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Aventures Pensées

Quand des tueurs en série m’ont emmené dans un champ

C'était au début du mois de septembre 2009. Avec un ami, nous quittions Winnipeg, nous dirigeant vers l'ouest. Nous marchâmes sur l'avenue Portage, jusqu'à la limite de la ville. Nous déposâmes nos sacs, et levâmes nos pouces. Quelques minutes plus tard, je vis une voiture s'approcher, vraiment très lentement. Même si elle roulait lentement, elle zigzaguait. J'eus la sensation qu'elle s'arrêterait, mais cette fois-ci, je n'étais pas certain si ça serait une bonne chose ou pas.

La voiture s'arrêta juste en face de nous, comme je l'avais pressenti. À l'intérieur, il y avait deux amérindiens (ces gens nous ont toujours beaucoup aidé, la plupart ont un coeur en or). Ils nous demandèrent si nous voulions embarquer, au-travers de la vitre du passager abaissée. Je ne savais pas si je devrais accepter ou pas, mais ils ne sentaient ni l'alcool ni la drogue, alors j'ai accepté. J'ouvris la portière arrière du véhicule, y poussa mon sac aussi loin que je le pouvais, et embarqua, suivi de mon camarade de voyage. Lorsqu'il referma la porte, nos nouveaux amis repartirent, roulant toujours aussi lentement en zigzaguant.

Quand ils nous demandèrent où nous allions, nous répondîmes que nous nous dirigions vers l'ouest. Ils nous répondirent qu'ils n'allaient pas très loin, mais qu'ils pourraient nous déposer un peu plus loin à l'extérieur de la ville, à condition que nous puissions les aider à faire quelque chose. Je demandai ce que c'était, et le conducteur expliqua: « Il y a un vendeur de fruits. Mais il ne vend les fruits qu'en paquets, jamais à l'unité. L'autre jour, je lui ai demandé juste une pomme, et il a refusé. Dans le coffre de la voiture, nous avons une vieille télévision. Je veux la lancer juste devant son kiosque, pour que lorsqu'il regarde à l'extérieur, il voie une vieille télé, vide et brisée, qui le regarde. »

Je trouvai cela très étrange, mais après un bref regard avec mon ami, nous agréâmes. Après tout, cela ne ferait de mal à personne. Mais sur le pare-soleil, je remarquai une lettre. Discrètement, j'en lus le début: « À M. *****, de M. *****, psychiatre » ... Je remarquai aussi que le chauffeur avait un très long couteau à sa jambe. Je pensai à communiquer ces informations à mon ami, mais je ne voulais pas exprimer quelque sorte de peur que ce soit. La plupart du temps, dans ces situations, l'une des pires choses à faire est de montrer son inquiétude plutôt que de rester calme.

Ils se rendirent au kiosque de fruits, nous lançâmes la télévision en face de celui-ci, et rembarquèrent dans la voiture. Du kiosque, une dame nous regardait, et le passager lui dit: « Hé, puis-je avoir une seule pomme? »

- Non, désolée, nous ne les vendons qu'en paquets, répondit la dame.

- Dîtes à votre mari qu'il est un homme mauvais! s'exclama le passager.

Ils commencèrent à argumenter, puis nous finîmes par nous en-aller. Étrange. Puis quelque chose d'encore plus bizarre se passa. Avec une expression peu rassurante, les deux hommes nous demandèrent si nous voulions voir où ils avaient grandi. Ils décrivirent l'endroit comme une vieille maison accessible par un chemin de terre au-travers des champs, un peu plus loin. Ça avait l'air un peu trop tueur en série à mon goût, et je dis gentiment que nous aimerions bien voir ça, mais que nous devions poursuivre notre chemin avant que le soleil ne se couche. Ils insistèrent, alors nous acceptâmes, ne voulant pas nous montrer irrespectueux de personnes qui, après tout, nous aidaient.

Dix minutes plus tard, ils quittèrent l'autoroute, tournant sur un petit chemin de terre au-travers des champs. Ils le parcoururent environ cinq minutes, et arrêtèrent la voiture. Il n'y avait pas de maison autour, et sous les pneus du véhicule, la terre était sèche et durcie par le soleil. Je me demandais sérieusement ce qui allait se passer, et mentalement, je me préparai au combat, sans le laisser paraître. Ils sortirent de la voiture. J'hésitai à faire de même, ne voulant pas laisser mes rares possessions dans la voiture de gens étranges. Mais ils nous demandèrent de débarquer, donc nous sortîmes.

Le chauffeur dit: « J'ai grandi ici. J'ai une question pour vous, les gars. Vivez-vous de la terre? » La question semblait honnête, et je répondis honnêtement. « Oui. Tout ce que nous mangeons et buvons provient de la terre. Nous dormons à l'extérieur, et nous aimons la nature. Elle est merveilleuse, et nous sommes heureux d'être sur Terre. » Alors le chauffeur tira son couteau hors de son fourreau.

Je pensai qu'ils allaient nous attaquer parce qu'ils pensaient que j'avais menti (ce n'était pas le cas), ou quelque chose du genre. Mais je restai impassible, souriant calmement, attendant de voir ce qui se passerait. Puis l'homme leva son couteau, en saisit la lame de son autre main, et pointa le manche vers moi. Il dit: « Vous êtes de bon gars. Ici, nous sommes dans le jardin où nous faisions pousser des légumes quand j'étais petit. Il y a toujours des gens qui en cultivent la terre. Prenez mon couteau, et servez-vous-en pour déterrer autant de légumes que vous voudrez. »

Nous prîmes beaucoup de carottes, radis et tomates. Comme j'étais affamé, je mangeai une tomate à l'instant même, et je peux vous dire, c'était la meilleure tomate que j'aie jamais mangée. Merci beaucoup à ces deux personnes, qui même s'ils étaient effrayants, étaient de bonnes personnes, respectueuses de la terre, et ils avaient des coeurs en or. Ils ne furent pas les seules personnes inquiétantes à m'aider sur ma route.

 

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